dimanche 20 septembre 2009

Résumé de l’article de Jean Pruvost « "Nouvelle-France", "Canada", "Québec" : parcours lexicographique du Grand Siècle au siècle des philosophes », tiré de l’ouvrage Les dictionnaires de la langue française au Québec, Les Presses de l’Université de Montréal, 2008, p. 161 à 198.

L’utilisation des mots « Canada », « Nouvelle-France » (dont la graphie varia quelque peu au fil du temps) et « Québec » dans les différents articles des dictionnaires français marquants nous permet de constater l’évolution des représentations françaises à propos du Canada. C’est le parcours lexicographique de ces mots que présente Pruvost dans cet article : celui-ci nous fait découvrir les attestations de ces trois mots-clés à l’intérieur des dictionnaires français du XVIIe siècle à la fin du XVIIIe siècle, soit jusqu’aux années de la parution de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert (1751 à 1772).

Avant le XVIIe siècle, la Nouvelle-France n’existe pas encore; il ne peut donc en être question dans les ouvrages français. On peut cependant lire une description de ce qu’est un « sauvage » dans les Epithètes françoises de Maurice De La Porte (1571); une opposition très nette entre la glorieuse France civilisée et le Sauvage barbare se dessine déjà. C’est au XVIIe siècle que l’on voit apparaître les premières mentions des mots « Canada » et « Nouvelle-France ». Alors que le Dictionnaire françois de Richelet (1680) ne fait aucune mention de ces mots-clés, le Diction-(n)aire universel de Furetière (1690) donne une place certaine au nouveau Monde, à l’Amérique et au Canada à l’intérieur de quelques articles (p. 167). Mais c’est dans la première édition du Dictionnaire de l’Académie françoise, parue en 1694, que la première attestation officielle du mot « Canada » est relevée (quatre occurrences de ce mot sont présentes dans cet ouvrage). Il est aussi question pour la première fois dans un dictionnaire de la « nouvelle France », dans l’article consacré au castor.

En 1718, le Dictionnaire comique, satyrique, critique, burlesque, libre et proverbial de Leroux met en scène l’ « Iroquois ». Le Grand Dictionnaire géographique historique et critique permettra pour sa part aux lecteurs français de découvrir l’Amérique: dans cet ouvrage de La Martinière, le Nouveau Monde est présenté à l’aide des premières cartes et d’un « listage des régions et peuples qui le composent » (p. 171). C’est dans le Dictionnaire universel françois et latin ou Dictionnaire de Trévoux, publié en 1732, que le mot « Québec » apparaît pour la première fois, dans la définition d’habitation. Ce dictionnaire aura également pour mérite de présenter la première latinisation des mots décrivant la vie en Nouvelle-France (p. 175). Le caribou, par exemple, est traduit par la forme savante « Cervus Canadensis ». Un long article est aussi consacré à l’Iroquois. On constate donc que les dictionnaires du XVIIIe siècle accordent une place de plus en plus importante à la Nouvelle-France.

La période allant de 1751 à 1772 sera particulièrement riche en attestations pour les trois mots-clés qui nous intéressent. En effet, c’est l’époque de la parution de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, qui constitue « l’oeuvre majeure du XVIIIe siècle » (p. 178). À l’intérieur de cet ouvrage de taille se retrouveront 90 occurrences de la Nouvelle-France, 190 pour le Canada et 9 pour Québec (p. 178-179). On retrouvera dans un article quelques informations historiques précises sur la ville de Québec. Pour ce qui est des mots « Canada » et « Nouvelle-France », ils sont présentés dans l’Encyclopédie comme une même entité politique. Se retrouve aussi dans cet ouvrage un article sur les « sauvages », qui contribuera à les présenter sous un autre jour : ceux-ci sont des êtres intelligents, bien qu’ils aient encore nombre de défauts. On constate que les encyclopédistes ne s’intéressent pas à la situation politique qui prévaut en Nouvelle-France : ils s’intéressent plus au climat et aux peuples qu’à la rivalité Français/Anglais. Les références faites à la Nouvelle-France, au Canada et au Québec dans l’Encyclopédie peuvent être regroupées en 13 thèmes (p. 182):

1. Les considérations géographiques;
2. Les noms de peuples et de peuplades;
3. Les « sauvages »;
4. La nature;
5. Le climat;
6. La religion;
7. Les traditions;
8. Les animaux;
9. Les plantes;
10. Les produits alimentaires;
11. Les produits médicaux;
12. Le commerce;
13. Les transports.

Mentionnons que plus de 20 occurrences de la nouvelle France se retrouvent dans le premier thème, les considérations géographiques, et que moins de dix mentions de ce mot se retrouvent dans le thème des peuples (p. 183-184). Plusieurs occurrences de la ville de Québec se retrouvent dans le thème de la religion.

Pruvost conclut cet article en mentionnant que le Diction(n)aire critique de la langue française de l’abbé Féraud, paru en 1787, présente quelques ajouts intéressants à propos des nouvelles réalités découvertes en Nouvelle-France, et que c’est seulement au cours de la première moitié du XIXe siècle que des commentaires politiques seront présents dans les articles consacrés au Canada, comme on peut le constater en étudiant le dictionnaire plutôt « édulcoré pour les dames et les jeunes personnes » de W. Duckett, paru en 1841 (p. 197).

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